Le pari osé de M. et Mme Farquhar

Histoire(s) Mauricienne(s) en collaboration avec le Mauritius Turf Club, raconte quelques-uns des grands moments des courses hippiques au Champ de Mars. Evénement fondateur, la toute première journée en 1812 eut un succès retentissant. Elle fut organisée de main de maître par le premier gouverneur britannique de Maurice, avec le concours de son épouse.

Robert Townsend Farquhar était un habile diplomate et un fin tacticien. Marchand influent, député,  il appartenait à la noblesse écossaise et avait servi dans la marine britannique jusqu’au grade de vice-amiral avant d’être nommé gouverneur de Maurice. Dès le départ il fit preuve de beaucoup d’ingéniosité et de constance pour favoriser le développement de l’île. Le premier gouverneur britannique de Maurice avait fait son entrée au Port-Louis le 5 décembre 1810, pour prendre la place du général Decaen, le gouverneur français déchu.

De nombreux citoyens décidèrent de rentrer en France, délaissant la colonie. Ceux qui restèrent durent se plier aux exigences de l’envahisseur. La capitulation prévoyait le rapatriement en France de toutes les forces militaires présentes sur l’Isle de France. Un serment de soumission, d’obéissance et de fidélité au Roi d’Angleterre fut exigé des habitants. Ceux qui refusèrent de se plier à cette exigence reçurent un délai pour s’y soumettre ou quitter l’île.

Mais le gouverneur Farquhar ne voulait pas antagoniser la population. Il fit rénover les voies de communication, lança la reconstruction du port, facilita les échanges et utilisa les fonds publics pour aider les entrepreneurs. Farquhar voulait surtout sceller l’accord conclu, lors de la prise de l’île, entre envahisseurs et habitants. Dans cette entreprise, il fut grandement aidé par son épouse, Maria, née Lautour. Celle-ci était d’origine française, fille d’un banquier qui avait fait fortune à Madras, en Inde. Mme Farquhar joua un grand rôle dans les relations entre l’administration et les colons.

Le couple Farquhar adorait les chevaux. Le gouverneur et son épouse étaient amateurs de courses hippiques. Farquhar eut alors l’idée d’organiser un affrontement hippique servant d’exutoire pour les colons encore sous le coup de l’humiliation de l’invasion. Un certain nombre d’entre eux cultivait aussi un grand amour pour le cheval.

Farquhar voyait les choses en grand. Il s’assura d’abord de créer un club calqué sur le modèle du Jockey Club anglais qui avait été fondé en 1750 à Newmarket, près de Londres et où naquirent les courses de chevaux telles que nous les connaissons aujourd’hui. Le club était composé de membres de l’administration britannique. Dans ses statuts, l’objectif de réconciliation était clairement stipulé, en tête du procès-verbal de fondation, précédant le règlement régissant les courses hippiques.  C’est ainsi que le Mauritius Turf Club se réunit pour la première fois le 12 juin 1812. Les premières courses de chevaux furent organisées dans la foulée…

La première journée eut lieu le 25 juin 1812 au Champ de Mars. La vaste plaine située au milieu des montagnes dominant Port-Louis était très appréciée des habitants. On venait y prendre l’air et s’y promener, à pied ou à cheval. Un camp d’entrainement militaire y fut aménagé ce qui lui fit prendre le nom de Champ de Mars. A la fin du 19e siècle, de fougueux gentilshommes prirent la fâcheuse habitude de s’y défier, tant et si bien qu’il devint un lieu de prédilection pour se battre en duel. A la prise de l’île en 1810, les Anglais perpétuèrent, pendant quelque temps encore, l’acception guerrière du lieu. Mais le nouveau gouverneur, allait modifier le destin du Champ de Mars car le site était idéal pour accueillir un hippodrome

Le 25 juin, Farquhar y fit courir ses propres coursiers qui se mesurèrent à ceux des grands propriétaires Ses chevaux avaient pour nom Rondeaux, Violoncello, Admiral ou encore Aide de camp. Mme Farquhar offrit une coupe en or au premier gagnant. Même si ses chevaux ne remportèrent pas d’épreuves, le couple Farquhar avait gagné son pari. Cette première journée attira la grande foule et eut un succès retentissant à travers l’île…

Par la suite, Farquhar, encouragé par cette réussite, entreprit de développer les courses de chevaux. Il fut épaulé par son secrétaire, Charles Telfair, un planteur d’origine irlandaise, installé à Bel-Ombre et par le colonel Edward Alured Draper, un aristocrate anglais plutôt conservateur, allié des grands planteurs et lui aussi grand amateur de chevaux. C’est celui-ci qui prit les rênes du Mauritius Turf Club à partir de 1814 et qui le développa. C’est pour cette raison qu’il est considéré, à tort, comme le fondateur du MTC…

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