A l’origine, la vaste plaine située au milieu des montagnes dominant Port-Louis était le cratère d’un ancien volcan. Lorsque les premiers occupants le découvrirent, en retrait de la rade naturelle du Port nord ouest, le site était couvert de palmiers. Dans leur entreprise de colonisation et d’exploitation des ressources de l’île en bois, les Hollandais entreprirent de le débroussailler. Les feuilles de palmiers servirent vraisemblablement aux premiers habitants à recouvrir leurs cases. Les premiers Français en firent grand usage au Port Nord ouest.
Au début de la colonisation française, le site, protégé par les montagnes et à distance respectueuse de la mer, semblait idéal pour accueillir une ville, selon les dires mêmes de l’ingénieur du roi, Jean François Charpentier de Cossigny. Avec l’aménagement du Port-Louis, sous le gouvernorat de Mahé de Labourdonnais, il était très apprécié des habitants. On venait y prendre l’air et s’y promener, à pied ou à cheval. Un camp d’entrainement militaire fut aménagé au pied de la Petite Montagne (sur laquelle sera érigée la Citadelle).
Le champ de mars est un lieu, généralement urbain, faisant référence à Mars, le dieu de la guerre. Dans la Rome antique, le champ de mars était une plaine située entre la ville et le fleuve. A partir de la Renaissance, ce nom était donné aux places sur lesquelles se déroulaient les exercices militaires. Et c’est tout naturellement qu’à Port-Louis, la vaste plaine entre les montagnes, où venaient s’entrainer les militaires, prit le nom de Champ de Mars.
A la fin du 19e siècle, de fougueux gentilshommes prirent la fâcheuse habitude de s’y défier, tant et si bien qu’il devint un lieu de prédilection pour se battre en duel… ou pour commettre un crime. En 1780, on y retrouva en pleine journée le corps ensanglanté de Bernard de Saint Orens, un capitaine de frégate. Mais l’homme était aussi le principal accusé dans une sombre affaire dans la disparition d’une riche cargaison appartenant à un armateur de Port-Louis. Comme les duels se déroulaient d’ordinaire au lever du jour, quand la ville dormait encore, le doute était permis. Mais l’on ne put jamais établir s’il y avait eu duel ou assassinat. Et le butin ne fut pas retrouvé…
En 1800, lorsque le gouverneur Malartic mourut, l’administration coloniale prit la décision d’y ériger son tombeau. On voulait ainsi rendre hommage à celui qui était commandant général des établissements français au delà du cap de Bonne-Espérance, qui avait “sauvé la colonie du chaos” durant la Révolution et su repousser les navires anglais faisant le blocus de l’île. Et aucun lieu n’avait la majesté voulue pour abriter la dépouille d’un grand gouverneur militaire, à part le Champ de Mars.
A la prise de l’île en 1810, les Anglais perpétuèrent, pendant quelque temps encore, l’acception guerrière du lieu. Des régiments de Cipayes qui avaient pris part à l’invasion, y furent cantonnés. Mais le nouveau gouverneur, Robert Farquhar, allait changer les choses et modifier le destin du Champ de Mars…
Dans le but de réconcilier les habitants français de l’île avec les occupants britanniques, il eut l’idée d’organiser des courses de chevaux. Et le site qui se prêtait le mieux à ce type d’activité était le Champ de Mars. C’est ainsi qu’avec l’aide de sa femme Maria, d’origine française, il organisa, en 1812, la première journée de courses, offrant au Champ de Mars une nouvelle vocation qui allait se perpétuer jusqu’à nos jours.
Dans d’autres pays la notion de champ de mars a elle aussi beaucoup évolué avec le temps. Beaucoup de grandes villes ont leur champ de mars qui sont des lieux magnifiques, remplis d’histoire et très prisés du public. Ceux de Paris, de Montréal ou encore de St Pétersbourg ont tous rempli la même fonction et sont aujourd’hui de majestueux espaces verts qui sont un peu les poumons de ces métropoles.
Sources : Ces hommes de la mer, de Marcelle Lagesse – The Mauritius Turf Club, 1812 – 2012
Le saviez vous ?
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