Au début du 19e siècle, Port-Louis recevait beaucoup de gens de passage, marins et commerçants. De petits établissements de type hôtelier, parfois en périphérie de la ville, proposaient à ces voyageurs un logement temporaire, principalement une chambre. Ces auberges offraient aussi un service de restauration.
Un recensement fait état de 10 auberges, en 1800, au Port-Louis. La ville abritait aussi 38 cantines, 12 maisons de traiteurs et 6 cafés. Les redevances annuelles réclamées à ces établissements par le gouvernement colonial variaient de 50 piastres pour les cantines à 150 piastres pour les maisons de traiteurs. Ville animée, Port-Louis avait aussi un théâtre, construit en 1788, à l’orée du Jardin de la Compagnie…
En 1800, Port-Louis vivait au rythme du négoce. La rade était remplie de navires de toutes les nations, venus vendre leur cargaison où y relâcher avant de continuer vers les Indes. Les boutiques se trouvaient aux rues de Paris (devenue Desforges), Nationale (aujourd’hui Royale); les beaux magasins aux rues de Pamplemousses, de l’Eglise, à la Place d’Armes et sur la Chaussée. Les cafés traiteurs et restaurants étaient regroupés autour du marché central et près du port, là où affluaient marins et étrangers.
A cette époque, la ville abritait environ 5 000 blancs et métis et le double d’esclaves d’origine africaine. Les premiers nommés vivaient dans les plus belles rues de la capitale, la rue du Rempart, la rue de l’Eglise, à l’ombre de grands arbres plantés sur deux rangs. Le bâtiment le plus visible de la ville était l’Hôtel du Gouvernement où vivait le Gouverneur.
La population dite de couleur s’était établie au sud, entre le Champ de Lort et la Montagne de la Découverte. Les Noirs, Asiatiques et Africains, vivaient dans des camps au nord, le camp Malabar et le camp Yoloff.
La plupart des rues n’étaient pas pavées, à quelques rares exceptions et les maisons étaient presque toutes en bois et basses, même dans les quartiers riches où elles étaient, en revanche, plus grandes, dotées de varangues et s’ouvraient sur des jardins. Rares étaient les maisons à étage.
Mais le Port-Louis de l’époque était aussi marqué par la guerre que se livraient Français et Britanniques sur la Mer des Indes. La ville était dotée de plusieurs batteries, sur l’île aux Tonneliers, au Fort Blanc. Au milieu de la rade, un gros vaisseau rasé qui sert aussi de prison, commande l’entrée de Port-Louis. C’est de cette forteresse flottante que sont donnés les ordres d’ouverture et de fermeture du port, au lever du jour et à la tombée de la nuit.
L’Isle de France était au cœur de la guerre de course à laquelle se livraient Français et Britanniques et se passionnait pour les interventions régulières des corsaires de la République. Toute la ville envahissait les quais pour voir arriver les bateaux corsaires remplis de riches butins qui firent la fortune des négociants et attiraient les commerçants de la côte africaine et du sud de l’Inde.
Ainsi au début de la première décennie du 19e siècle, la ville vivait dans une certaine opulence au rythme de bals et de réceptions. Mais à partir de 1808, elle allait connaître les affres du blocus anglais, avec la stagnation des affaires et les problèmes de ravitaillement pour les habitants, avant la prise définitive de l’île en 1810…
Sources : Port-Louis, histoire d’une capitale, de Jean Marie Chelin (à paraître)