Le séjour doux-amer de Joseph Conrad à l’île Maurice

Joseph Conrad écrivain de langue anglaise majeur du xxe siècle séjourna près de deux mois à Maurice, entre octobre et novembre 1888. A cette époque, il était encore un officier inconnu de la marine marchande britannique et portait le nom de Capitaine Korzeniowski.

Teodor Józef Konrad Korzeniowski, naquit le 3 décembre 1857 à Berditchev (Ukraine). Orphelin à l’âge de onze ans il fut confié à son oncle maternel qui demeurait à Cracovie. Attiré par une carrière dans la marine, Conrad partit pour Marseille en 1874, où il s’embarqua comme mousse sur un voilier. Il fit pendant près de quatre ans son apprentissage en France avant d’entrer dans la marine marchande britannique, où il demeura pendant plus de seize ans. Il obtint son brevet de capitaine en 1886, prit la nationalité britannique.

En 1888, il prit le commandement du trois mâts Otago, qu’il avait ramené de Bangkok (Siam) à Melbourne en Australie. Après avoir navigué pendant des semaines sur l’océan Indien, l’Otago s’arrêta donc à Port-Louis. Selon son biographe américain, F.R. Karl, il y fit la connaissance de Gabriel Renouf qui lui présenta ses trois sœurs. Korzeniowski courtisa Eugénie Renouf, l’une des sœurs, à qui il proposa même le mariage. Mais Eugénie refusa, car elle était déjà fiancée avec un pharmacien qu’elle épousa deux mois plus tard. Effondré, Conrad envoya un billet d’adieu aux Renouf, indiquant son intention de ne plus jamais revenir à l’île Maurice.

De son séjour à l’île Maurice, Joseph Conrad n’a écrit qu’un seul texte : Un sourire de la fortune, histoire de port, une longue nouvelle où l’île est appelée « perle de l’océan Indien ». C’est un des romans les moins connus de Conrad. Comme la plupart de ses livres, ce récit romancé est autobiographique. Il relate une brève histoire sentimentale dont l’héroïne est une femme troublante qui ne sort jamais de chez elle. Toujours selon F.R. Karl, le capitaine Korzeniowski fréquenta, en même temps que les sœurs Renouf, une autre jeune fille qui se serait prénommée Alice. Ce serait celle-ci qui aurait servi de modèle à l’héroïne de son roman…

En 1890, Conrad partit travailler comme capitaine de steamer pour la Société du Haut-Congo officiant dans l’État indépendant du Congo. Il fut engagé pour trois ans, mais ne réalisa qu’un aller retour en steamer entre Stanley-Pool et Stanleyville avant d’être rapatrié en Europe pour dysenterie. Entre 1891 et 1893 il accomplit des voyages en Australie puis au Canada. En janvier 1894, il débarqua à Londres et mit fin à sa carrière maritime.

Se consacrant désormais à son travail littéraire, Conrad publie en 1896 son premier livre, La Folie Almayer, où il dépeint la perdition d’un Occidental en Malaisie. La même année, il épousa Jessie George dont il eut deux fils Boris né en 1898 et John né en 1906.

En juin 1910, Conrad, qui venait de souffrir d’une grave dépression nerveuse, quitta sa résidence d’Aldington, dans le Kent, où il s’était installé l’année précédente, pour Capel House, ferme isolée près d’Ashford, dans le même comté, pour près de dix ans. En 1919, obligé de quitter Capel House, les Conrad s’installèrent provisoirement à Spring Grove, avant de s’installer à Oswalds . En 1924, après une crise cardiaque en juillet, Joseph Conrad mourut le 3 août à Bishopsbourne dans le Kent.

Conrad n’a connu que tardivement le succès commercial, avec Chance en 1913, ce dont il eut toujours du mal à comprendre la raison, sans doute la trop grande complexité de son œuvre. Tout au long de sa vie d’auteur, il a affirmé vouloir écrire pour le grand public, et laisse une œuvre considérable, avec notamment Le Nègre du Narcisse, Lord Jim, Jeunesse, Au cœur des ténèbres, Typhon, Nostromo, Le Miroir de la mer, Sous les yeux de l’Occident, L’Agent secret, Victoire…

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